Grangues


Le château de Grangues
Le château de Grangues

Grangues est une petite commune très vallonée située à moins de 5 km de la côte normande, Dives-Cabourg. 

 

Dans la nuit du 5 au 6 juin, plusieurs planeurs se "crashent" sur la colline. Des habitants aident les parachutistes rescapés mais une cinquantaine de parachutistes ont trouvé la mort à Grangues.

Une stèle a été dressée dans le cimetière à l'initiative du lieutenant John Shinner, rescapé du massacre perpétré par les Allemands au château de Grangues.

Une cérémonie se déroule chaque année en hommage aux 54 soldats alliés morts le 6 juin à Grangues.

Clichés de la collection A Bosquain
Clichés de la collection A Bosquain
Le planeur CN-295 tombé près du calvaire de Grangues
Le planeur CN-295 tombé près du calvaire de Grangues


Témoignages - Grangues

Massacre au château

Je suis arrivée au château de Grangues en avril 1944, les Allemands qui l’occupaient n’étaient pas embêtants avec le personnel, le plus gradé était un adjudant relativement sympathique. Dans la nuit du 5 au 6 juin, nous avons entendu des bruits inhabituels, le passage d’avions était quotidien mais cette nuit là ce n’était pas la même chose, l’adjudant est venu dire au Comte qu’il pensait que c’étaient les prémices du Débarquement. Il nous a fait sortir du château et descendre au sous-sol où nous avons logé jusqu’à la Libération.

Au matin du 6 juin, l’adjudant nous a autorisés à sortir, nous avons vu des prisonniers devant les communs, des blessés étaient allongés, nous ne savions pas qui ils étaient. Les Allemands nous ont juste autorisés à leur donner du thé mais surtout sans leur parler.

Soixante-quinze ans après, j’ai encore dans la tête la vision d’un soldat qui avait le ventre complètement ouvert… Ces prisonniers ont été emmenés vers les hôpitaux, ce devait être à Pont Lévêque.

L’adjudant allemand nous a dit que pendant la nuit des prisonniers avaient voulu s’échapper, l’un d’eux aurait tiré sur les Allemands et il a été fusillé. Les autres soldats ont été tués.

Thérèse Mallet

 

Témoignage d'un parachutiste tombé à Grangues

Juste avant minuit, le 5/6/1944, nous avons décollé de Fairford, dans un avion qui, d’après moi, devait être un Lancaster. Alors que nous approchions de la Normandie, nous avons rencontré un nombre considérable de tirs de la « Flak ». Nous entendions le bruit de plus en plus assourdissant du feu des Allemands. Nous étions terrifiés d’autant plus que les projecteurs allemands éclairaient nos avions.

Tout à coup, il y eut un bruit de métal écrasé, notre avion a été touché car le pilote a cherché à fuir, ce qui peut expliquer que nous ayons été parachutés à l’est de la Dives au lieu de l’Orne près de Ranville. Je n’ai vu aucun obstacle anti-planeurs, çà ressemblait à un petit vallon. On nous ordonna de sauter. 

Wally Troutt

 

Le périple de Marie avec son bébé, de Caen à Grangues

« J’étais à la clinique de la Miséricorde avec ma fille Andrée, née le 29 mai 44, (le lundi de la Pentecôte), alors que les bombardiers lâchaient leur chargement de mort sur la ville, détruisant systématiquement la clinique, pourrait-on dire … Les étages des bâtiments sont tombés, il n’y avait plus de fenêtres, plus d’escalier pour sortir. Notre bâtiment était le moins touché, il y avait des flammes partout, même dans le jardin.

 

À 3 heures du matin, ne voulant pas mourir ici, écrasée dans le prochain raid de ces avions, et contre l’avis des infirmières rescapées de la Maternité, avec insistance, j’ai demandé des vêtements pour moi et ma fille que j’allaitais, ma petite Andrée. J’ai récupéré un linge pour protéger son visage de la poussière, et voyant l’incendie qui gagnait l’escalier, je me suis décidée à quitter immédiatement les ruines de cet établissement. Plus de porte à ouvrir, que des murs éventrés ! Escaladant les décombres, je suis sortie par la seule issue possible, la chapelle, où une vieille dame m’a aidée à sortir par une issue de fortune.

 

Il était alors 5h00 du matin, ce mercredi 7 juin. Débouchant rue Nationale, ma surprise a été de voir les bâtiments de la ville en état de ruines fumantes. Il n’y avait plus aucune vie apparente, plus rien, tout avait été balayé comme dans une tornade de feu, des incendies partout ! Fuyant avec mon bébé dans les bras, je n’ai pas pu passer le premier pont, écrasé par les bombes. Le second, sérieusement endommagé, permettait encore le passage d’un piéton en escaladant. J’ai mis une heure à monter la rue d’Auge avec Andrée dans les bras, passant de décombres en décombres, dans des poutres enchevêtrées, les barrages de fil de fer barbelé déchiquetés et pèle-mêle.

 

Arrivée à la Demi-lune, avant de prendre la route de Troarn et Rouen, me retournant, j’ai eu une vue panoramique et dominante sur Caen en feu, noyée dans un nuage de poussière et de fumée. La ville a été détruite à 80 %, et nous étions parmi les miraculés de ce bombardement. Continuant mon trajet, en sortant de Mondeville, au niveau de la cartoucherie, les Allemands étaient là avec un barrage de chevaux de frise [les « chevaux de frise » sont de lourdes barrières de défense anti-char formées de barres métalliques entrecroisées], des fils de fer barbelés et des sentinelles en armes interdisant tout passage. Je leur ai expliqué ma situation, Andrée dans les bras, ils m’ont ouvert la porte et laissée passer !

 

Dix minutes après, il était 8h30, je me suis arrêtée chez des gens qui ouvraient leurs contrevents au moment de mon passage. Une halte d’une demi-heure, le temps de faire boire ma petite et de reprendre un peu de forces et mes esprits. Reprenant ma route à pied, une heure après, je suis arrivée à Démouville, chez des amis, les Guillot, où j’ai séjourné pendant 8 jours. » 

Marie Christophe


Une plaque historique au cimetière de Grangues


Léon Tardy, un Résistant à Grangues

Léon Tardy s’est s’engagé très tôt dans la Résistance. Dès 1940, il accueille des soldats anglais rescapés de l’encerclement de Dunkerque. En 1942, il rejoint le réseau Zéro France dont le responsable local est Aimable Lepeu, pharmacien à Dives-sur-mer. Arrêté en mars 1944, il est déporté et  décède  le 1er Mai 1945. De très nombreuses décorations lui furent décernées à titre posthume. 

 

En 1938, Léon Tardy décide de louer une petite ferme à Grangues, il achète des vaches, des poules, des lapins et un âne pour aider aux tâches quotidiennes. Sa fille Eliane avec ses frères et sœurs et sa mère Marcelle s’occupent de cette bâtisse, sans eau ni électricité pendant que Léon commence son nouveau travail de mécanicien à Cabourg. Mobilisé en 1939, il est vite libéré en raison de son âge et des enfants. 

 

Sa fille Éliane raconte : 

“Et l’Occupation commence”.

En juin 1940, le jour de l’Appel du 18 juin, “mon père revint à la maison avec 50 kg de farine et autre ravitaillement. Il nous dit que c’était l’invasion et l’Occupation, qu’il ne l’accepterait pas l’ayant déjà subie de 1914 à 1918” (…) Au début de l'Occupation, les Allemands se donnaient du mal pour se faire accepter, mais sous la cendre couvait le feu”.

En juillet 40, deux Anglais n’ayant pu réembarquer à Dunkerque et fuyant devant l’armée allemande arrivent à Grangues chez Léon Tardy qui avait appris l’anglais au cours de la première guerre mondiale. « Ils se cachaient de l’armée allemande depuis plus d’un mois, terrorisés à l’idée d’être découverts, ils avaient vu leurs camarades assassinés sous leurs yeux.” Léon leur fait de faux papiers et comme les Bretons à l’époque ne parlaient que peu le français, il les déclare en tant qu’ouvriers saisonniers bretons. Jim et Harold aident à la ferme avec les enfants Tardy.

En 1941, Léon trouve un réseau et fait partir Jim. Renseignés, les Allemands débarquent chez les Tardy où Harold pris de panique se cache sous le lit parental. Marcelle Tardy, questionnée par les Allemands, répondit “très maîtresse d’elle même” : “Vous parlez des saisonniers ? Ils sont repartis car nous n’avions plus de travail pour eux”. Harold part le lendemain.

« Et la Gestapo s’installa à Caen. Pour cacher ses activités de résistant, mon père fit de l’abattage clandestin, Marcel l’aidant et transportant des colis destinés à Paris, les réfugiés de passage prenant le relais et effectuant certains travaux à la ferme ou attendant d’être cachés ailleurs. »

 

Pendant les années de guerre, en plus de jeunes Français, Léon Tardy a également caché deux Américains, trois Canadiens et un Norvégien. Des messages annoncèrent leur bon retour en Angleterre.

Eliane Alexandre née Tardy

 

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Récit de Eliane Alexandre, fille de Léon Tardy, résistant
Installé dans une ferme à Grangues, Léon Tardy qui fait partie du réseau Zéro France, accueille dès 1940 des soldats britanniques puis il rejoint le réseau Zéro France. Eliane, sa fille raconte ...
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Décorations de Léon Tardy
A titre posthume, Léon Tardy a reçu de nombreuses décorations de la part des gouvernements britannique, belge et français
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Léon Tardy Résistant FFI
Léon Tardy, résistant reconnu et décoré, faisait partie du réseau Zéro-France dont le responsable Aimable Lepeu était pharmacien à Dives-sur-mer. Il facilitait l'évasion d'aviateurs anglais et cachait des réfractaires au STO.
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Témoignage de Pierrot Neuville
Pierrot habitait le haut de Grangues, au Mont dit Mont, dans une ferme tout près des canons qui étaient installés sur la colline. Contrairement à Dives, Grangues n'a pas été évacué en juillet 44. Pierrot se souvient de la libération, des éclats d'obus qui ont tué sa grand-mère et l'ont épargné.
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Massacre au château de Grangues
La Libération de Grangues par Thérèse Ma
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Le périple de Marie Christophe de Grangues à la Libération
Marie a accouché à Caen quelques jours seulement avant le 6 juin, elle revient à pied avec son bébé Andrée jusqu'à Grangues. André, son mari tente d'aller la chercher. Un périple qui dure près d'un mois ...
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Des parachutistes anglais cachés à Grangues
Marcel Panel transmet les témoignages d'habitants de Grangues qui ont aidé les premiers parachutistes britanniques à Grangues
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Un réfractaire au STO, Marcel Panel
Marcel Panel a été envoyé dans la Sarthe pour échapper au STO
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Lettre du soldat britannique Willy Trout
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Récit du soldat britannique Mold
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Voir aussi : Crash des avions à Grangues dans la nuit du 5 au 6 juin 1944 : Dossier Crash aériens